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Vous me parlez de Dominique Ehrhard et cela me donne l'envie de continuer sur ce sujet, car l'homme m'avait passionné lors de l'entretien que j'avais eu avec lui.

Vous avez créé ensemble le jeu Lascaux.

Que retenez-vous de cette collaboration avec Dominique Ehrhard, de l'artiste et de l'homme en général ?

 

Lascaux ? C’est amusant vous savez, car ce jeu n’a pas d’existence réelle. Imaginez un éditeur (que je ne citerai pas) qui voit un projet que lui montre un autre éditeur (Lui Même) et qui décide de réaliser, fabriquer et vendre le jeu qu’il a vu brièvement. Il le fait sur la seule base du souvenir de ce qu’il a brièvement vu. Il le fait sans l’autorisation de l’éditeur d’origine, sans l’autorisation des auteurs (Ehrhard et moi) et sans recourir à la règle bien entendu, sinon ce ne serait pas drôle !

 

Mais les types de cette maison d’édition le font, bien à l’aise. Ils y collent même nos noms. Sympa et inattendu pour le coup ! C’est un truc assez rare. Je dois dire que je n’avais jamais vu ça avant cet épisode et pas non plus depuis je crois bien…

 

Alors donc, pas Lascaux… Le jeu est bel et bien Boomerang. Et c’est à mes yeux une assez jolie chose à jouer… et à regarder !

 

Donc, parlons de Dominique Ehrhard qui est également l’auteur des illustrations de ce jeu Boomerang… C’est un homme rare, qui porte en lui des univers touffus, féconds, riches de multiples talents, jouant de l’ombre et de la lumière. Il est de surcroît d’une grande culture dont il fait une expression modeste bien qu’elle soit large et profonde. Nous avons travaillé ensemble sur des dizaines de projets. Et toujours, ces expériences ont été pour moi de belles leçons d’exigence, d’intelligence et pour finir, des moments de vraie grâce. Les exigences que Dominique met dans son travail sont exactement celles que je décrivais un peu plus tôt, bien qu’avec les jeux, son point de départ n’est pas nécessairement un concept ou un principe d’ordre général.

 

Son envie est de raconter une histoire.

 

Une histoire parfois connue (celle des Condottieres, celle d’Ulysse, celle des colons européens en Amérique, celle de Robinson Crusoé, celle de Cook en Océanie ou celles de toutes les légendes ou de tous les contes de notre enfance). Parfois aussi ce sont des histoires plutôt rares, révélant le grand mangeur de grimoires qu’il est ! Mais en tout cas oui, bien souvent ce sont des histoires…

 

Vient ensuite la mise en scène qu’il va mettre en œuvre soutenue par des mécanismes souvent très sophistiqués (Dominique est le prince du mécanisme où je fais un truc qui me permettra d’obtenir un truc qui me permet de faire un autre truc pour pouvoir avancer dans l’histoire et d’avoir la martingale grâce à quoi je ferai un énième truc pour envisager de gagner la partie ! Et chaque rouage est une trouvaille. Sinon, à quoi bon, pas vrai ?). La leçon donnée par Dominique est toujours la même : de la discussion et des échanges que nous pouvons avoir, il va tenir compte. Il le fera pour retirer ce qui dépasse, sûrement. Mais pas forcément pour adopter ce que je lui ai proposé. Il va toujours réinvestir la chose dans une toute nouvelle direction. À la condition expresse que sa trouvaille ultime soit simple, fluide, originale et élégante !

 

​​Dominique Ehrhard a également réalisé de nombreux jeux destinés aux enfants. Sur ce terrain, il est à l’égal de ce qu’a pu faire Anne Sylvestre dans ses chansons pour enfants où les mélodies sont travaillées et inspirées, où les arrangements sont tout sauf gnangnan et où les textes sont d’une tenue irréprochable. À mes yeux, il n’y a pas mieux qu’Anne Sylvestre dans le paysage de cette chanson-là et elle fait même figure à mes yeux de référence absolue.

 

Dans ses jeux pour enfants, il y a chez Dominique Ehrhard une identique et totale exigence de qualité thématique, des habillages parfaits et des mécanismes rares (que beaucoup se seraient gardés pour une autre occasion !). C’est l’extrême exigence alliée à l’extrême générosité.

 

​Voilà… mais ce n’est pas tout ! Le reste, c’est l’homme. Et cet homme tourmenté et exigeant, je l’aime comme un frère.

Intégralité interview sur le site Jeux viens vers vous

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